Depuis des jours je me réjouis de retrouver cette amie que je n’ai pas vue depuis des mois, j’ai tant de choses à lui raconter, et je veux savoir comment elle va depuis tout ce temps. Lorsque j’arrive à notre rendez-vous, elle n’est pas seule. Déception. Je lui en veux de ne pas m’avoir dit qu’elle serait accompagnée.
Plusieurs scénarios possibles : je n’ai pas envie de faire d’effort avec cette personne que je ne connais pas, j’abrège la rencontre. Je lutte et sans doute je repartirai de mauvaise humeur. Ou alors la discussion s’engage, la personne qui l’accompagne amène un équilibre différent dans nos échanges, elle est peut-être intéressante, drôle, avenante… ou pas ! Je me laisse surprendre, je vis l’instant comme il se présente, je choisis le contentement.
Il y a quelques mois nous vous avions parlé de Ahimsa, la non-violence, l’un des 5 les yamas décrits par Patanjali dans les yoga sutras, les yamas sont les valeurs universelles concernant notre relation aux autres, à la société. Aujourd’hui nous vous proposons d’explorer l’un des 5 niyama qu’il décrit, les observances ou règles de vie que le yogi pratique pour lui-même, dans une discipline personnelle, un moyen (et non une fin) pour progresser sur le chemin du yoga : Santhosa, le contentement.
« Un bonheur sans égal vient de la pratique du contentement »
Sutra II. 42, Patanjali
Être satisfait de ce que l’on a, et de ce que l’on est.
Celui qui n’a pas travail se désespère, celui qui en a un se plaint et souffre du manque de temps, du stress. Celle-là voudrait la même voiture que sa voisine. Celui qui n’a pas d’enfant retourne ciel et mer pour avoir un, celui qui en a rêve de plus de repos et de liberté. Celui qui a une maison voudrait un jardin, alors que celui-ci trouve que son jardin est trop grand… Celui qui est blond voudrait être brun, et inversement… J’envie celui-ci quand cet autre me jalouse… Nos vies sont bien souvent emplies de ces frustrations, déceptions et autres jalousies qui n’apportent que souffrance.
Si je reviens à l’anecdote de mon rendez-vous avec mon amie, le contentement ça n’est pas se dire « après tout je m’en fou », « ça aurait pu être pire » ou encore se répéter en boucle « ça va être sympa, ça va être sympa, ça va être sympa », ni encore « t’en pis, la prochaine fois ça sera mieux », mais c’est être ouvert.e à cet inattendu. Ainsi Santosha c’est être content mais ça n’est absolument pas se contenter en rongeant son frein, en espérant mieux plus tard ou ailleurs, en enjolivant artificiellement à coup d’auto-conviction une situation désagréable. J’avais des attentes (ah ! avoir des attentes voilà un vaste sujet…), la vie propose autre chose.
La vie est sans intention, elle n’est pas là pour me satisfaire ou apporter de l’insatisfaction. Je suis une goutte dans le flot de la vie, je n’ai d’autre choix que d’accepter ce mouvement.
Santhosa c’est être satisfait de ce que la vie propose, et même c’est accueillir chaque déception, chaque frustration, chaque difficulté, comme une chance de confrontation qui fait grandir, évoluer. Certes la réalité n’est pas toujours agréable, mais se poser en victime c’est lui donner plus de force et laisser la colère, la frustration, la jalousie s’épanouir dans l’existence. Allez vers santosha c’est cultiver le goût de l’instant présent, accepter une situation, une personne comme elle est ET comme elle n’est pas, et prendre la responsabilité de notre réaction face à ce que propose la situation, la personne, le vie en fait!
Comme toujours en yoga développer cette attitude commence sur le tapis. Lors de la pratique des asanas, Santosha c’est accepter les limites du corps, le manque de force, de mobilité, de souplesse, d’équilibre, accepter les appréhensions, voir les peurs, et explorer ses limites sans attente. Apprendre à développer « un espace heureux » dans la posture. Le mécontentement voile le mental et rend la pratique impossible alors que le contentement, apaisant le mental, développe la capacité de méditer. La méditation permettra ensuite de développer la neutralité du regard intérieur pour agir en conscience sans être dans la réaction.
Si l’on se tourne vers un autre texte fondateur du yoga, la Bhagavad Gîtâ, le message est le même. L’enseignement qu’y délivre Krishna est le suivant : se défaire de l’emprise des sens et donc des désirs, agir sans considération pour le futur, qui n’existe pas, sans prise de bénéfice personnel, mais simplement en acceptant le rôle qui nous est assigné de par notre histoire, dans l’instant.
Il s’agit donc de laisser la vie suivre son cours sans chercher à retenir ni les objets, ni les liens affectifs, ni les jouissances, ni la vie.
Pour conclure on pourrait dire que le contentement selon Patanjali c’est un état d’être sans manque, sans volonté d’accaparer, c’est être dans une acceptation pleine de ce qui est, ici et maintenant, qui amène un état de paix intérieur stable. Santhosa nous permet non plus de subir le contexte mais de comprendre nos choix et de devenir un acteur responsable de notre vie, créateur.
Santhosa c’est aussi être plein de gratitude pour la vie, ce qu’elle offre, c’est s’émerveiller de la moindre petite chose, c’est dire merci pour ce que l’on a et ce que l’on est. Le secret du bonheur en somme !
« Le bonheur c’est de continuer à désirer ce que l’on possède. »
St Augustin
A propos de l’auteur
Agathe
Après avoir exercé des fonctions d’ingénieur agronome, elle part vivre 2 années en Inde où elle découvre la philosophie du yoga et cela modifie profondément sa vision de l’existence.
De retour en France, elle se forme au Yoga Saraswati, un yoga traditionnel dans la lignée Satyananda. Elle s’y est formée au Hatha-Yoga, Kundalini Yoga et Raja Yoga.
Elle se forme également au Yoga du Son auprès de l’Institut des Arts et de la Voix et se consacre pleinement au yoga et à son enseignement depuis 6 années.
Agathe 06 52 58 97 51
agathe@larbre-yoga.fr
bonjour Agathe, Ollivier, Sophie,
merci pour ce très beau texte sur les niyamas et particulièrement Santosh que justement nous venons de mettre en pratique (disons, d’observer dans nos vies) durant les cours de yoga que je donne en Bourgogne. J’écris ce message car d’une part je suis aussi de la lignée Satyananda, j’ai passé quelques années entre Munger (BSY -BYB) et Rikhia :) et d’autres hauts lieux de yoga. Et aussi je me suis permis d’utiliser quelques paragraphe de votre texte dans mon article sur Santosh :) …. en vous citant naturellement… Donc voilà, n’hésitez pas à faire de même si le coeur vous en dit, j’ai mis l’adresse du site, yoga simplement, au cas zoù :) Ommm shantii … Isabelle Yogapushpa
Namaste Yogapushpa,
Nous sommes heureux que le texte diffuse s’il t’a inspiré.
Nous irons voir ton site,
Hari Om
Atmapriya, Agathe